La vigne en Valais est essentiellement une viticulture de montagne. Chez nos voisins italiens on parle volontiers de « viticoltura eroica » pour les vignobles inscrits dans ce type de topographie exceptionnellement accidentée. Cette « viticulture héroïque » est parfaitement illustrée par les différentes parcelles que possède la Cave des Amandiers : des pentes vertigineuses où la vigne s’agrippe parfois péniblement au coteau, de nombreuses petites terrasses soutenues par des murs de pierres sèches, et une mécanisation quasiment inexistante.
C’est cet environnement d’une diversité extraordinaire ainsi qu’un climat particulier au Valais qui permettent d’obtenir un équilibre et une maturité optimale des raisins. Viennent s’ajouter d’autres facteurs climatiques plus locaux. On ne peut ignorer le rôle joué par le foehn, un vent chaud qui vient sécher les grappes en période de vendanges, mais également, au niveau microclimatique, la chaleur générée par l’échauffement des murs le jour et restituée la nuit. L’altitude et l’exposition jouent également un très grand rôle : on remarque ainsi de très grandes hétérogénéités d’un « parchet » (parcelle de vigne en Suisse) à l’autre, permettant de cultiver de nombreux cépages aux caractéristiques forts différentes.

C’est donc ici qu’Alexandre Delétraz s’est installé en 2008 avec l’envie de créer de grands vins sur des terroirs d’exception et tenter de révéler au mieux les qualités des cépages autochtones valaisans dans un environnement authentique… C’est un projet unique de création et de réhabilitation d’un domaine sur un vignoble de montagne constitué de terrasses vertigineuses qui étaient souvent à l’abandon. Pour réunir différents « parchets » (parcelles en suisse) de vigne en une seule entité de 6,5 hectares, il lui a fallu acquérir environ 200 parcelles à 70 propriétaires différents !!… Nombre de ces vignes ont été replantées en sélections massales de cépages endémiques et traditionnels puisés dans la riche ampélographie du Valais.

Les débuts s’effectuent dans un « mazot » (chalet d’alpage), puis dans un garage à tracteur à Fully. Depuis 2011, Alexandre a trouvé un lieu plus adéquat sur la commune de Saillon. Bien que les installations de vinifications soient modernes, le travail reste essentiellement artisanal. Les vignes sont entretenues manuellement à cause de la topographie compliquée des coteaux abrupts (6,5 hectares), constitués de petites terrasses qui s’étagent de 450 à 900 mètres d’altitude. Le climat est extraordinairement favorable à la vigne, mais afin de toujours garantir une qualité irréprochable et une maturité optimale des baies, un tri drastique de la vendange est à chaque fois réalisé. Les rendements sont faibles et adaptés à la vigueur de chacun des parchets, pour assurer une bonne concentration des arômes et des polyphénols de raisin.
Vous l’aurez donc compris, que ce soit à la cave ou à la vigne, le travail se fait en douceur et surtout en prenant le temps… Le temps de faire un travail minutieux sur chaque cep, sur chaque grappe, le temps aussi d’élever les vins, lentement, tranquillement, sans les brusquer ni leur imposer de contraintes qui ne leurs permettraient plus de s’exprimer librement. Seuls les suisses savent parfaitement faire cela !

Le cépage Cornalin de Fully, localement appelé « Rouge du Pays », fait sa première apparition écrite en 1313. Il a bien failli disparaître au profit de cépages plus productifs et aux aptitudes culturales moins compliquées. En effet, c’est un cépage qui assimile mal le magnésium, dès lors, lorsque la sécheresse s’installe, le feuillage vire au rouge et finit par tomber. De plus le Cornalin est peu productif et produit en alternance une année sur deux. Ainsi une année de récolte normale, c’est déjà peu (25 hectolitres à l’hectare) et une année de petite vendange … pratiquement rien (15hl/ha) !
Il a la qualité de ses défauts par contre, car il offre alors de belles concentrations. C’est un cépage qui donne un vin coloré (encre de chine) aux tanins harmonieux et qui conserve toujours une belle acidité. Il a au nez, comme en bouche, un coté griottes, kirsch, mais aussi fumé, « charbonné ». Il est reconnaissable entre tous et supporte très bien l’élevage en barriques. Il possède également, lorsqu’il est bien né, un très beau potentiel de garde.