Avant de vous installer au Cap, vous avez visité de nombreux vignobles dans le monde. Que vous ont apporté les échanges que vous avez pu avoir avec d’autres vignerons ?

Pendant une dizaine d’années, j’ai parcouru les vignobles de la Côte d’Or en Bourgogne, du Médoc, du Piémont… Avoir quelques hectares sur ces appellations prestigieuses était un rêve malheureusement inaccessible pour moi. En revanche, l’Afrique du Sud représentait un eldorado pour produire des vins qui correspondait à ce que je souhaitais.
Avec toutes mes rencontres, j’ai constaté un dénominateur commun pour les vins que je trouvais les plus intéressants et les plus équilibrés. Tous étaient produits par des vignerons ayant choisi les cépages parfaitement adaptés à leurs terroirs.

Waterkloof, le domaine où est produit False Bay, se situe à quelques kilomètres de l’océan, à 300 mètres d’altitude. Pouvez-vous nous présenter ce lieu ?

Waterkloof est un amphithéâtre qui surplombe la ‘False Bay’ plongeant dans l’océan Atlantique situé à 4 kilomètres. C’est le courant antarctique et le vent froid qui sont à l’origine de notre climat relativement frais. Cela permet à la vigne d’avoir une croissance longue pour produire des raisins avec une acidité fraîche et une maturité optimale.
Les vignes sont présentent dans la région depuis le début des années 70 et j’ai repris le domaine en 2004.

Le vignoble représente seulement la moitié de surface du domaine. Pourquoi ne pas avoir planté sur l’autre moitié ?

Nous sommes propriétaires de plus de 200 hectares de terres dont moins de 100 hectares sont cultivés. Nous nous sommes engagés à conserver plus de la moitié des terres pour la flore et la faune naturelles. Cela nous permis d’obtenir en 2008 le titre de Champion de la Biodiversité décerné par le WWF (World Wildlife Fund).

La biodynamie était votre fer de lance bien avant la mode actuelle. Comment est né ce choix ?

Nous croyons fermement que les méthodes agricoles conventionnelles (en particulier l’utilisation de pesticides et d’engrais chimiques), associées à des techniques de vinification modernes, standardisées et interventionnistes (par exemple l’utilisation de levures aromatiques), contribuent à effacer les identités du cépage et du terroir. Le résultat au cours des 30 dernières années a été une homogénéisation accrue des vins élaborés d’un endroit à un autre. C’est exactement l’inverse que je souhaitais !
Au début des années 80, j’ai travaillé avec un producteur en biodynamie et j’ai découvert que ses vins avaient une dimension supplémentaire avec plus de complexité et d’intérêt. Les vignes étaient également en excellente santé. Nous avons décidé très tôt de cultiver en biodynamie à Waterkloof. Les vins de la gamme ‘False Bay’ ne sont pas certifiés en biodynamie car une partie des raisins n’est pas issue de notre propre domaine.

Vous attachez de l’importance à produire des vins non standardisés, avec un minimum d’intervention. Pouvez vous nous en dire un peu plus sur les deux cuvées que nous proposons : Crystalline Chardonnay et Bush Vine Pinotage ?

Pour produire du vin sans aucun intrant, à part du soufre en quantité minimale, il faut un faible rendement et une forte teneur naturelle en nutriments. Les levures indigènes sont beaucoup moins performantes que les levures aromatiques, ce qui prolonge la fermentation. Les vins sont moins primaires, mais plus fins et plus complexes.
Le Chardonnay ne subit pas de malolactique et conserve donc une fraîcheur éclatante. Le Pinotage a une cuvaison de plus de 20 jours avec une forte oxygénation, suivie d’un élevage dans de vieux foudres de chêne. Cela donne un vin avec des tanins fins complètement intégrés, ce qui manque souvent à ce cépage.