Comment et quand est née votre passion pour le vin et pourquoi vous êtes-vous intéressé aux vins étrangers ?
photo par Leif Carlsson

Ma passion est née des rencontres que j’ai faites. D’abord avec d’autres passionnés qui m’ont transmis leur flamme, puis avec des vignerons. C’est en allant dans le vignoble et en échangeant avec ceux qui font le vin qu’on touche du doigt son importance. Dans le vin l’incarnation est primordiale. Il y a des femmes et des hommes derrière chaque étiquette, leur histoire, leur sensibilité ainsi que celle de leur terre et de leurs ancêtres. C’est d’ailleurs assez unique. Dans quel autre secteur peut-on remonter quasi systématiquement jusqu’à celui qui a planté la première graine ? Il y a dans le vin ce formidable romantisme agricole, cette liaison directe entre la terre et le verre, entre le lieu, les vignerons et le goût final.
Ensuite, l’appétit vient en mangeant. Après avoir apprécié et commencé à mieux appréhender les vins français, la curiosité pousse à découvrir ce qui se passe hors de nos frontières. Les pays voisins, d’abord, l’Italie et l’Espagne, qui sont de grandes terres de vins. Puis le reste du monde viticole qui est tout aussi passionnant avec des histoires parfois anciennes et d’autres qui s’écrivent depuis seulement quelques décennies mais avec une rapidité et une justesse déconcertante. En passant les différents niveaux du WSET puis le Master of Wine, j’ai aussi été confronté à des vins venant de partout. La richesse du vin c’est la diversité, tant en termes de terroirs et d’interprètes que de goûts.
Et puis le vin est un voyage. Il a cette capacité à vous emmener un peu partout, tant physiquement qu’émotionnellement. Quand on aime voyager, c’est difficile de ne pas s’intéresser aux vins étrangers.

Vous êtes consultant pour V&T depuis le début de l’année. Qu’est-ce qui vous a motivé à nous rejoindre et que représente pour vous V&T dans le paysage des vins du monde en France ?

Valade & Transandine est incontestablement devenue une référence, et ce très rapidement, ce qui donne encore plus de mérite au chemin parcouru. La sélection est de très haut vol et le travail accompli est exemplaire. Rejoindre l’aventure n’a donc pas été un choix très difficile. Mes relations avec l’équipe étaient aussi très bonnes, ce qui a évidemment compté. Par ailleurs, j’ai le privilège de connaître un bon nombre de vignerons représentés par Valade & Transandine. Il y a de grandes personnalités et de grandes histoires. Je pense à Eben Sadie, à Marie-Thérèse Chappaz, à Clive Paton ou encore à Zoltan Demeter qui sont des pionniers et des exemples dans leur pays. Par ailleurs, l’équipe de Valade & Transandine ne s’est jamais reposé sur ses lauriers, avec une quête perpétuelle de nouveaux talents. Personne ne connaissait Chris Alheit il y a seulement 10 ans. Birichino est aussi une aventure récente, mais le talent est là et le verre parle. Il y a finalement ce qui fait une grande gamme : un savant mélange entre des domaines historiques et la jeunesse montante.
Je suis ravi de pouvoir contribuer à parfaire cette gamme, même si la tâche est rude. Dans certains pays comme l’Afrique du Sud ou la Nouvelle-Zélande, Valade travaille déjà avec quasiment tous les meilleurs !

Quel est l’intérêt des amateurs de vins en France pour les vins étrangers et voyez-vous une évolution de la consommation ces dernières années ?

Même si la France est un grand pays de vin et que les Français consommeront probablement toujours beaucoup de vins français, ce qui est logique et légitime, il y a une ouverture de plus importante sur le reste du monde. Cela s’explique aisément. Tout d’abord certaines régions françaises pratiquent depuis quelques années des prix inflationnistes qui poussent les palais affûtés à regarder ailleurs. Ensuite, le talent s’exporte, la globalisation a permis à d’autres terres de vins de se révéler ou de se faire entendre. D’ailleurs on parle souvent de l’Europe et du Nouveau Monde. C’est un cliché. On fait du vin en Afrique depuis 1659. L’industrie viticole Argentine a aussi plusieurs siècles d’histoire derrière elle. Et puis la jeunesse vient parfois créer une émulation positive et pousse à la remise en cause. Les premiers pinots noirs de Nouvelle-Zélande ont été produits il y a seulement quelques décennies. Pourtant que de chemin parcouru depuis ! Certains Néo-Zélandais ont plus de respect pour la notion de terroir que des vignerons établis depuis des générations. Je crois que les amateurs sont de plus en plus conscients que nous n’avons pas, en France, le monopole du savoir-faire et de la qualité.
Et puis les formations sur le vin, le WSET notamment, forcent les amateurs à s’ouvrir. Une fois qu’on a été touché par le virus des vins étrangers, je crois que la consommation se diversifie, ce qui n’empêche aucunement de continuer à apprécier nos meilleurs vins français.

Vous voyagez énormément pour aller dans les vignobles et rencontrer les vignerons. Quels sont d’après vous les régions du monde qui seront sous les projecteurs demain, pour quelles raisons ?

Je pense qu’il y a une réalité climatique qui va faire la part belle aux régions fraîches ou tempérées. Dès lors, je pense que l’Allemagne a de très beaux jours devant elle, tout comme la Patagonie ou encore les vignobles de très hautes altitudes en Argentine et ailleurs. La Nouvelle-Zélande a également de sérieux arguments et peuvent encore révéler de nouveaux terroirs.
Je crois aussi que l’Italie commence tout juste à avoir la reconnaissance internationale qu’elle mérite. C’est un des pays viticoles les plus passionnants mais aussi l’un des plus fragmentés et complexes. Il suffit de regarder le nombre de cépages, de DOC et de DOCG, de microclimats et les différences topographiques et culturelles. De nombreux terroirs sont encore dans l’ombre et vont émerger. Taurasi par exemple est encore peu connu, alors que c’est un des vignobles les plus intéressants au monde.

Vous découvrez pour nous de nouveaux domaines, comment établissez-vous cette sélection, quels sont vos critères ?

Le premier critère, c’est bien sûr la qualité du vin. Ensuite, il y a l’histoire, l’interprète et la qualité de la relation avec celui-ci. Un bon importateur est aussi l’ambassadeur du vigneron. Il faut comprendre et aimer le produit, mais aussi que la relation soit forte avec le producteur. Je crois aussi que c’est important que toute l’équipe de Valade & Transandine soit convaincue et qu’il y ait un consensus sur les nouveaux domaines. Nous avons tous des goûts et des sensibilités différentes. Je ne veux pas avoir le sentiment de forcer la main. Ce n’est pas moi qui commercialise le vin ensuite, au jour le jour. Pour bien le faire, il faut qu’il y ait une vraie conviction.

Auriez-vous un coup de cœur à nous présenter pour cette rentrée ?

Je vais avoir du mal à n’en citer un seul. Dans les nouveaux domaines que Valade & Transandine représentent, trois sont de vrais coups de cœur. Benanti tout d’abord qui représente à mes yeux ce que l’Etna peut offrir de mieux. Une grande histoire, celle de la renaissance d’un grand vignoble, et des vins à la fois profonds et extrêmement raffinés. La Cantina Lonardo à Taurasi, ensuite, est aussi une véritable pépite. Un tout petit domaine, des très vieilles vignes et la magie de l’aglianico sur cette terre volcanique. Il y a quelque chose de sanguin, de puissant et de soyeux dans les Taurasi produits par la famille Lonardo. Enfin je citerais Porseleinberg. Probablement la plus belle syrah sud-africaine. Un vin qui vient d’une terre très pauvre, d’un endroit extrême au niveau climatique et qui a pourtant cette incroyable élégance. Le 2020 rappelle un très grand Côte-rôtie dans son profil tactile et aromatique, avec cette forte empreinte saline des vins sud-africains.
Il y en a bien d’autres que je tairais pour l’instant et qui seront j’espère représentés par Valade & Transandine très bientôt !