Pouvez-vous dans un premier temps nous faire un état des lieux de votre vignoble ?

Mon vignoble s’étend sur une surface de 15 hectares, où la culture est guidée par nos certifications Bio et Biodynamique depuis plus de 20 ans.
Notre domaine offre une palette diversifiée de 24 cépages, reflétant la richesse et la variété de nos terroirs : le chasselas, le pinot noir, la petite arvine, la marsanne, le gamaret, le galotta, le diolinoir, le païen (savagnin), le sylvaner, le pinot blanc, l’humagne rouge, l’humagne blanche, la syrah, le merlot, le cabernet franc, le cabernet sauvignon, le completer, le gamay, le cornalin, le durize, la roussane, le rèze, et la diolle.
S’étendant à des altitudes variant entre 450 m et 650 m, les vignes puisent leur caractère distinctif dans différents terroirs : granitiques sur Fully, et calcaires sur Charrat et Chamoson.
Ces dernières années, nous avons également replanté de vieux cépages indigènes.

Quelle est la proportion des blancs et des rouges ? Pour les blancs quel est le cépage le plus surprenant pour vous ? Et comment pourriez-vous définir l’identité du Pinot Noir dans le Valais ?

Nous produisons 8 cuvées de blancs, 15 cuvées de rouges et 1 cuvée de Rosé.

Pour moi, le cépage le plus surprenant est le « compléter ». C’est un vieux cépage originaire du canton des Grisons qui est planté sur à peine 4 hectares dans toute la Suisse, dont un peu plus de 3 hectares dans les Grisons. Ce cépage s’acclimate bien en Valais et c’est la raison pour laquelle nous en avons replanté.

Le Pinot Noir s’exprime parfaitement sur la rive gauche du Rhône, qui est le versant le moins exposé au soleil. Sur ces terroirs très frais, il fait de forts jolis vins.
Choisir la bonne date de vendange et vinifier « justement » le Pinot Noir relève souvent du challenge. C’est contraignant et motivant à la fois, mais quand « tout est aligné », on obtient finesse et puissance. Peu de cépages allient aussi bien ces deux caractéristiques.

Comment se sont déroulées les dernières vendanges ?

Après un millésime 2022 que l’on pouvait considérer comme « facile », et après les difficultés rencontrées en 2021, on peut dire que les vendanges 2023 se sont plutôt bien passées. Les raisins vendangés bénéficiaient de belles maturités et les vinifications se déroulent comme nous l’espérions. Le millésime sera joli.

Il y a une prise de conscience depuis quelques années de l’intérêt de la culture en biodynamie et vous étiez l’une des percusseuses sur le sujet. Faut-il tenter de convaincre les vignerons réticents ou s’agit-il plutôt d’un engagement personnel ?

Je pense avant tout qu’il faut savoir convaincre par l’exemple et, selon moi, la pratique du Bio est la base, le plus élémentaire.
Après il faut que chacun trouve son chemin. Je m’efforce pour ma part de me rendre disponible au domaine pour celles et ceux qui veulent en savoir plus sur la biodynamie, qui n’est pas une science mais qui bénéficie de l’addition des expériences, du partage et des réussites de chacun.

La nature vous offre le fruit, vous le magnifiez ensuite. Quelle est la ‘recette’ Chappaz dans les vignes et dans les chais ? J’imagine que votre façon de travailler évolue tous les ans…

Nous prenons le temps d’observer la vigne, nous essayons de la comprendre au mieux. C’est primordial pour nous et cela relève presque de la prophylaxie.
Quand on tend à comprendre l’adéquation Vigne-Terroir-Millésime, le tout dans un écrin de biodiversité, alors on peut espérer aboutir à de belles vendanges.
Opter pour de petits rendements, laisser place aux levures indigènes, juger de l’extraction en fonction du cépage et du terroir, ne pas tomber dans le systématique sont pour nous les fils conducteurs.

Sur ce vignoble, que vous connaissez par cœur, qu’est-ce qui vous émerveille ?

En Valais, les vignes entourées ou adossées à la montagne sont un spectacle permanent. Je ressens une certaine plénitude à l’automne quand tout se calme. Le raisin est au chaud dans la cave et la vigne prend une couleur feu tout en reconstituant ses réserves.

La vie vous a installé en Suisse, mais y aurait-il une autre région dans monde où vous aimeriez faire du vin ?

Je crois que j’aurais aimé être vigneronne en Provence, et plus précisément du côté de Bandol où j’apprécie énormément les vins. Je reste en admiration face à la lumière qui irradie dans cette région…